Managers, évitez le paradoxe d’Abilene

Il est des situations où la prise de décision au sein de l’équipe peut poser problème, générer des tensions et finir en catastrophe. C’est le cas du paradoxe d’Abilene, le connaissez-vous ?

Le paradoxe d’Abilene par l’exemple

Ce paradoxe a été décrit par le sociologue américain Jerry Harvey. Décrivons-le tel qu’il l’a fait, à travers une histoire.

Un couple marié se trouve chez les beaux-parents de la femme par une journée étouffante, dans une petite ville texane. Il fait 40 degrés à l’ombre et un vent chargé de poussière souffle. Ils sont tous les 4 sous le porche de la maison, dans le flux d’air d’un ventilateur, à siroter une citronnade glacée et jouer aux dominos.
Le beau-père propose d’aller dîner à Abilene, à 85km de là. La femme acquiesce, elle aimerait y aller. L’homme n’est pas séduit par l’idée de tous ces kilomètres dans une vieille voiture sans climatisation. Mais devant le souhait de sa femme, il opine. La belle-mère, dans la foulée, trouve l’idée bonne.
Après 170km de trajet et un mauvais dîner, ils sont de retour à la maison, dépités et transpirants. La belle-mère finit par lancer qu’elle aurait eu envie de rester à jouer au dominos, mais que l’enthousiasme général l’avait  emporté. L’homme réagit : lui non plus n’avait pas envie d’aller à Abilene, mais il voulait faire plaisir aux 3 autres. La femme s’énerve et dit qu’elle aurait été folle de lancer une idée pareille, elle a juste suivi le mouvement. Quant au père, il finit par expliquer qu’il voulait faire plaisir à tout le monde, les visites de sa fille et de son gendre étant tellement rares…

Le paradoxe d’Abilene, aussi dans la vie professionnelle

Cette situation peut aisément être transposée dans notre vie quotidienne (un film que personne n’a en réalité envie d’aller voir, …). Mais elle existe également dans l’univers professionnel : par exemple, une décision prise à l’unanimité dans l’équipe, qui ne satisfait pourtant personne.
Passer une heure trente à regarder un film qu’on ne souhaitait pas voir est une situation désagréable. Dans l’univers professionnel, prendre une décision que chacun réprouve peut avoir de graves conséquences…

Quels sont les moteurs du paradoxe ?

• La décision commune ne satisfait personne et s’oppose aux sentiments profonds de chacun.
• Chacun garde pour soi son opinion réelle, pour satisfaire les autres et/ou peur d’être ostracisé.
• Au final, chacun est dépité – voire en colère – à cause de la décision prise « par les autres ». Or chacun est en fait d’accord avec les autres !

Le manager et le paradoxe d’Abilene

Il est possible de désamorcer un voyage vers Abilene ! Et le manager est aux avant-postes : à lui d’assurer une bonne communication au sein de l’équipe.

Le manager doit permettre à chacun d’exprimer réellement ses opinions, au-delà même de la volonté d’appartenance au groupe. L’avis contraire – ou différent – doit être entendu, il fait partie de la richesse du dialogue et de l’équipe, il permet de désamorcer le syndrome. En cas de syndrome d’Abilene en effet, il suffit d’un avis réellement personnel exprimé pour que d’autres s’y rallient.
Parler aux membres de l’équipe de façon individuelle est une bonne technique pour connaître les nuances ou les réserves de chacun sur une idée.
Un autre désamorçage possible est de lister les « pour » et les « contre » d’une idée émise, en amenant chacun à prendre position.